Proust et la peinture / par Jean-Paul Dupuy

Marcel Proust partageait avec Charles Baudelaire une passion pour l’image et pour la peinture. On sait à quel point cet homme, extrêmement cultivé, était un fin connaisseur de l’art ; ces Portraits de Peintres (1894) en témoignent. A la Recherche du Temps Perdu fait fréquemment référence à la peinture ancienne mais aussi aux artistes du début du XXème siècle. Chez Proust, les arts majeurs sont synthétisés à travers trois personnages : Vinteuil pour la musique, Bergotte pour la littérature et Elstir pour la peinture. Le travail d’Elstir fait de lui un artiste de la modernité impressionniste avec comme modèle possible la figure du peintre américain Whistler. Dans les différents volumes publiés par Proust les noms de Giotto, Carpaccio, Michel-Ange, Rembrandt ou Chardin côtoient ceux de Monet, Manet ou encore Moreau. Dans la Recherche, le personnage de Swann est un passionné de Vermeer qui associe une œuvre de Botticelli à la personnalité d’Odette, sa future épouse ; et l’on connait bien la scène de la mort de Bergotte devant la Vue de Delft de Vermeer. Le génie littéraire de Marcel Proust le conduit à ne jamais décrire littéralement les œuvres d’art mais à en évoquer l’essence, le souvenir, parfois à travers un détail ou une atmosphère. Pour l’auteur de La Recherche, la peinture n’est pas une simple représentation de la réalité mais bien plutôt le moyen d’en interroger le mystère.