Björk, l’Islandaise interconnectée / par Benjamin Lassauzet

Le lien de la musicienne, chanteuse, auteure-compositrice-interprète et actrice islandaise Björk à son île natale est tellement ancré que, à la faveur d’une carrière internationale très médiatisée, cette artiste se positionne comme une sorte d’ambassadrice d’un petit pays qui auparavant n’existait que sur les cartes. Or, si la composante islandaise de son identité musicale est placée relativement en retrait dans les deux premiers albums, Homogenic (1997) fait au contraire figure de retour aux sources culturelles pour Björk. En effet, elle intègre à la composition des procédés qui la rattachent à une tradition musicale islandaise. Dès lors, ces ingrédients seront utilisés tout au long de sa carrière.

Mais non contente d'inviter son public majoritairement occidental et urbanisé à déplacer l'attention du centre géographique vers la périphérie en brouillant les frontières et en fusionnant les langages musicaux autour des mêmes objets pop, Björk propose d'aller plus loin en ne se contentant pas de briser les oppositions entre êtres humains, mais aussi en regardant différemment ceux qui distinguent l'humain, le vivant et la technologie. Cette perspective déployée par Björk au fil de ses albums est très proche de la philosophie de l'interconnexion de Timothy Morton, qui aborde le monde comme coexistence en postulant qu'aucun homme n'est une île. Un comble pour une insulaire !